Record 2025 Tunisie — 5,2M de touristes et perspectives de croissance
En 2025, la Tunisie affirme sa place parmi les destinations touristiques mondiales en plein essor. Après une décennie marquée par des crises sécuritaires, économiques et sanitaires, le pays traverse aujourd’hui une phase de redéploiement stratégique dans le secteur du tourisme. Selon un rapport publié le 5 août 2025 par Travel and Tour World, la Tunisie figure désormais aux côtés de destinations emblématiques comme l’Espagne, la Grèce, le Mexique et les Émirats arabes unis, reconnue pour sa stabilité retrouvée, sa diversité culturelle et son potentiel de croissance durable.
Ce n’est plus un simple rebond : c’est une renaissance économique, sociale et culturelle, portée par une stratégie claire, des investissements ciblés et une offre touristique de plus en plus sophistiquée.
Un bilan 2025 : des performances historiques
À fin juillet 2025, les indicateurs touristiques tunisiens affichent des chiffres records, dépassant même les niveaux d’avant la pandémie.
Selon les données de l’Office national du tourisme tunisien (ONTT), relayées par IntelliNews, Carthage Magazine et African Manager, la Tunisie a accueilli 5,297 millions de touristes non-résidents au 20 juillet 2025. Ce chiffre représente une hausse de 9,8 % par rapport à 2024 et un bond spectaculaire de +16,2 % par rapport à 2019, année de référence avant la crise sanitaire.
Les nuitées enregistrées s’élèvent à 12,36 millions, en progression de 7,1 %, tandis que le taux d’occupation hôtelière atteint 35,3 %, un niveau significatif pour une destination encore en phase de redéploiement. Quant aux recettes touristiques, elles s’élèvent à environ 3,998 milliards de dinars tunisiens (TND), soit plus de 1,3 milliard d’euros, dépassant pour la première fois le seuil de 2019.
Ces performances confirment que la Tunisie n’est plus en phase de rattrapage, mais bien en phase de croissance structurelle, avec un secteur touristique qui contribue désormais à hauteur de 8 % du PIB et emploie plus de 350 000 personnes directement ou indirectement.
Les leviers de la reprise : une stratégie cohérente et ambitieuse
La réussite de 2025 ne doit rien au hasard. Elle résulte d’une stratégie nationale bien définie, mise en œuvre avec constance depuis 2022, combinant investissements publics, partenariats privés, innovation et diversification de l’offre.
1. Une demande internationale en forte expansion
La Tunisie a réussi à élargir son bassin de clientèle au-delà de ses marchés traditionnels. Si la France, le Royaume-Uni et l’Italie restent les principaux fournisseurs de touristes, de nouveaux marchés connaissent une croissance fulgurante :
- L’Allemagne : +14 % d’arrivées par rapport à 2024, grâce à des campagnes ciblées et des vols charter renforcés.
- La Suisse et l’Irlande : des marchés émergents attirés par l’authenticité, la sécurité et le rapport qualité-prix.
- Le Maghreb : l’Algérie, le Maroc et la Libye représentent désormais 12 % des arrivées totales, avec une forte demande pour les séjours familiaux et culturels.
- L’Europe de l’Est : la Pologne, la Roumanie et la République tchèque montrent un intérêt croissant pour les circuits culturels et désertiques.
Par ailleurs, les touristes russes et ukrainiens, longtemps absents, reviennent progressivement via des circuits organisés en Méditerranée, notamment vers Djerba et Hammamet.
2. Des investissements massifs dans les infrastructures
Le gouvernement tunisien, en partenariat avec le secteur privé, a lancé un plan d’investissement de plusieurs milliards de dinars dans les infrastructures touristiques. En 2024-2025, plusieurs projets majeurs ont été achevés :
- Modernisation des aéroports : agrandissement des terminaux de Djerba-Zarzis, Monastir et Tozeur, équipés de systèmes biométriques et de services numériques.
- Réhabilitation des routes touristiques : amélioration des liaisons entre les sites archéologiques (Carthage, Dougga, El Jem) et les zones balnéaires.
- Nouvelles unités hôtelières : plus de 4 000 chambres supplémentaires ont été inaugurées, dont plusieurs hôtels de luxe (5 étoiles) signés par Accor, Mövenpick et Marriott.
Ces projets ont été facilités par des incitations fiscales, des partenariats public-privé (PPP) et des investissements étrangers provenant du Koweït, des Émirats et de Turquie.
3. Diversification de l’offre : au-delà du tourisme balnéaire
La Tunisie a réussi à dépasser l’image de destination "soleil et plage" pour proposer une offre touristique riche, variée et innovante.
- Tourisme culturel : Carthage, Kairouan, Dougga et l’Amphithéâtre d’El Jem attirent des foules croissantes. Des visites nocturnes, des festivalisations et des expositions interactives ont été mises en place.
- Tourisme d’aventure et écotourisme : le sud tunisien (Chott el Jerid, Matmata, Tataouine) devient une destination prisée pour les randonnées, circuits 4x4 et expériences désertiques durables.
- Tourisme médical et thermal : Hammamet, Sidi Bou Saïd et Tozeur développent des centres de bien-être et de soins thermaux, attirant des Européens en quête de détente et de soins abordables.
- Tourisme d’affaires (MICE) : Tunis accueille désormais des congrès internationaux, sommets africains et séminaires technologiques, soutenus par un nouveau centre des congrès inauguré en 2024.
Cette diversification permet de lisser la saisonnalité du tourisme, qui s’étend désormais sur 9 à 10 mois par an, réduisant la dépendance à la seule saison estivale.
La digitalisation : un levier de compétitivité majeur
En 2025, la Tunisie a fait un bond technologique significatif dans la gestion de son offre touristique. Le ministère du Tourisme a lancé la plateforme nationale "Tunisia Travel Hub", un guichet unique permettant aux voyageurs de réserver en ligne hébergement, transport, activités et guides certifiés.
Des applications mobiles comme Visit Tunisia offrent des itinéraires personnalisés, des traductions en temps réel, et des QR codes interactifs sur les sites historiques. Un système de paiement digital sécurisé a été déployé dans les zones touristiques, réduisant la dépendance au cash.
Ces avancées ont été saluées par l’Organisation Mondiale du Tourisme (OMT), qui a inclus la Tunisie dans son top 10 des pays émergents en matière de transformation numérique du tourisme.
Une concurrence régionale intense : la Tunisie face à des géants
Malgré ses succès, la Tunisie évolue dans un environnement concurrentiel extrêmement tendu. Ses voisins méditerranéens ont eux aussi investi massivement :
- Le Maroc : plus de 13 millions de touristes en 2024, avec des campagnes marketing agressives et un développement du tourisme de luxe.
- L’Égypte : plus de 14 millions de visiteurs, attirés par les pyramides, la mer Rouge et les croisières sur le Nil.
- La Turquie : véritable géant régional, avec plus de 60 millions de touristes en 2024.
Face à ces géants, la Tunisie mise sur une différenciation par la qualité, l’authenticité et l’expérience humaine. Comme le souligne Travel and Tour World, « La Tunisie ne cherche pas à rivaliser en volume, mais en valeur ajoutée, en singularité et en durabilité. »
Les défis à relever pour une croissance durable
Malgré les succès, plusieurs obstacles structurels persistent :
1. Formation et qualité du service
Le secteur souffre encore d’un manque de personnel qualifié, notamment dans l’hôtellerie, la restauration et le guidage. Bien que des écoles hôtelières aient été renforcées, la fuite des talents vers l’étranger reste un problème.
2. Dépendance aux marchés européens
Plus de 75 % des touristes viennent d’Europe, et 60 % des arrivées se concentrent entre juin et septembre. Cette dépendance rend le secteur vulnérable aux crises économiques ou climatiques en Europe.
3. Réglementation et fiscalité
Les professionnels réclament une réforme fiscale plus incitative, notamment sur la TVA, les droits de douane et les investissements étrangers. La bureaucratie freine encore certains projets.
4. Environnement et durabilité
Le développement touristique exerce une pression croissante sur les ressources naturelles, notamment en zones côtières. L’urbanisation, la pollution plastique et la surexploitation de l’eau menacent des écosystèmes fragiles.
Des initiatives de tourisme durable ont été lancées (labels "Green Tunisia", chartes locales), mais leur mise en œuvre reste inégale.
Vers un plan stratégique 2025-2030 : la Tunisie mise sur l’avenir
Pour répondre à ces enjeux, le gouvernement prépare un plan stratégique national du tourisme 2025-2030, dont l’annonce officielle est attendue en septembre 2025. Ce plan, élaboré avec l’appui de l’OMT, repose sur cinq piliers :
- Modernisation de l’offre : mise à niveau des hôtels, développement de nouveaux produits (tourisme médical premium, tourisme spatial à Tozeur ?).
- Renforcement des incitations fiscales : allègements pour les investissements verts et innovants.
- Accélération de la numérisation : IA, réalité augmentée, blockchain pour la traçabilité.
- Promotion ciblée : campagnes en Asie (Chine, Inde, Corée), développement du tourisme religieux.
- Durabilité et inclusion : coopératives locales, intégration des communautés rurales, protection des zones naturelles.
L’objectif ? Atteindre 10 millions de touristes annuels d’ici 2030, avec un panier moyen de 800 euros par touriste.
Une Tunisie qui reprend sa place
En 2025, la Tunisie n’est plus une destination en convalescence. Elle est devenue un acteur crédible, compétitif et attractif sur la scène touristique mondiale. Grâce à une stratégie claire, des investissements ciblés et une offre diversifiée, elle a su récupérer sa crédibilité et séduire une nouvelle génération de voyageurs.
Certes, les défis sont encore nombreux. La concurrence est féroce, les marges de manœuvre économiques limitées, et la transition écologique complexe. Mais une chose est sûre : la Tunisie a retrouvé sa fierté touristique.
Avec une volonté politique affirmée, un secteur privé dynamique et une population engagée, la Tunisie est aujourd’hui bien positionnée pour devenir une destination incontournable de la rive sud de la Méditerranée.
Sources : Travel and Tour World, Kapitalis, IntelliNews, Carthage Magazine, African Manager, OMT, ONTT, Ministère du Tourisme de Tunisie.